Le courageux combat de Soltan Achilova au Turkménistan

mars 1, 2021

Soltan Achilova, finaliste du Prix Martin Ennals 2021, est une reporter turkmène âgée de 71 ans qui se bat pour la liberté d’expression au Turkménistan, l’un des pays les plus isolés au monde et où la censure règne. Son combat lui a valu d’être victime d’agressions physiques, interdite de voyager et surveillée de très près. Malgré ces représailles, elle continue à lutter pour faire éclater la vérité et à dénoncer les violations des droits humains commises dans son pays.

Un pays sans liberté

Depuis plus de dix ans, la journaliste indépendante et défenseuse des droits humains Soltan Achilova documente les violations des droits humains au Turkménistan. Elle sensibilise aussi l’opinion publique sur ces abus dont l’ampleur reste largement méconnue faute de libertés de la presse, d’expression, de réunion, de religion et de mouvement dans son pays. Le constat dressé par Human Rights Watch dans son dernier Rapport mondial est accablant : « Le gouvernement turkmène impose des restrictions punitives sur les libertés des médias et de religion ; il contrôle aussi étroitement l’accès à l’information. Les militant-e-s indépendant-e-s, y compris les activistes exilé-e-s, sont constamment menacé-e-s de représailles par le régime. Des dizaines de personnes disparues de force croupiraient dans les prisons turkmènes, où la torture et les mauvais traitements sont endémiques. 

Une femme de grand courage

C’est la surveillance constante dont elle fait l’objet et le déni des droits fondamentaux de ses concitoyens qui ont poussé Soltan à devenir une activiste. Elle sait d’ailleurs que la situation ne s’améliorera pas de sitôt dans son pays et que poursuivre sa vocation ne se fera pas sans risques, mais elle ne renonce pas pour autant  à informer ses concitoyen-ne-s ainsi que la communauté internationale des abus du régime Turkmène. « J’ai souvent pensé à abandonner mon combat, mais l’état de non-droit total qui règne à cause du gouvernement me pousse à redoubler d’efforts. Il faut bien que quelqu’un dise au monde entier ce qui se passe vraiment dans ce pays isolé », nous confie-t-elle.  

Les menaces, la surveillance et le harcèlement, n’ont pas eu raison de sa détermination. Peu après la cérémonie de remise du Prix Martin Ennals, elle a  mis en ligne une vidéo sur YouTube dans laquelle elle réprimande le président Turkmène et critique sévèrement son régime, qui contrôle le pays d’une main de fer au détriment du bien-être de la population. Publiée en turkmène et sous-titrée en russe, sa vidéo a été visionnée plus de 50 000 fois.

La nécessité d’une reconnaissance et d’une protection internationales

Les autorités turkmènes ont souhaité faire taire Soltan Achilova, estime Guadalupe Marengo, de l’organisation Amnesty International et membre du Jury du Prix Martin Ennals. « Il est clair que les autorités turkmènes voulaient s’assurer qu’elle serait réduite au silence pour avoir osé critiquer et remettre en question les politiques cruelles et discriminatoires du gouvernement », commente-t-elle. Comme le Turkménistan fait rarement la une des journaux, le pays échappe non seulement à l’attention de la communauté internationale, mais les journalistes et défenseur-euse-s des droits humains qui dénoncent les abus du système sont de facto elles et eux aussi, isolé-e-s. 

Sans le courage et le travail de Soltan, les violations des droits humains seraient commises dans un silence assourdissant au Turkménistan. Tous les membres du Jury du Prix Martin Ennals s’accordent à dire que Soltan Achilova a besoin de la solidarité et de la protection de la communauté internationale. 

« Ma nomination au Prix Martin Ennals me touche beaucoup. C’est un signe de reconnaissance de mon travail par les organisations de défense des droits humains. Cela m’encourage à poursuivre mon travail de journaliste », a témoigné Soltan dans un message préenregistré pour la cérémonie de remise du Prix Martin Ennals 

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