Asma Jahangir

1995 Laureate

Asma Jahangir Asma Jahangir 1995 Laureate

Personal Details

Biographie


C’est avec une grande tristesse que nous avons appris le décès subi de Madame Asma Jahangir. Elle a combattu l’injustice toute sa vie. En tant qu’avocate et défenseuse des droits de l’homme, elle s’est attaquée à nombre de problèmes difficiles et dangereux, en contestant les lois discriminatoires et en représentant les victimes de graves injustices.

Elle a reçu le Prix Martin Ennals en 1995 alors qu’elle courait un risque personnel important, situation dans laquelle elle a été si souvent.

Nous présentons à sa famille, ses amis et ses collègues nos plus sincères condoléances.


A l’image de son père, Malik Jilani, ancien fonctionnaire pakistanais devenu opposant politique, Asma Jahangir a consacré sa vie à défendre les droits de l’homme et à faire respecter en particulier ceux des femmes, des enfants et des minorités religieuses. Avocate de profession, elle est aujourd’hui une spécialiste incontournable en matière de droits de l’homme.

Lauréate du prix Martin Ennals 1995, son travail de militante des droits de l’homme lui a permis d’acquérir rapidement une reconnaissance internationale.

Cette même année, en 1995, elle est harcelée, menacée de mort et agressée physiquement pour avoir pris la défense de Salamat Masih, un jeune chrétien de quatorze ans accusé de blasphème. Cette affaire, qu’elle finit par remporter, lui a valu d’être applaudie par la communauté internationale.

Son combat pour la défense des droits de l’homme, intrinsèquement lié à son histoire personnelle et familiale, a commencé en 1971: son père est alors placé en détention pour l’influence importante qu’il exerçait au sein de la Ligue Awami, organisation politique sévèrement réprimée après les élections de 1970. Dix ans après le dépôt de sa première plainte contre la détention de son père, Asma finit par remporter un procès historique et obtient sa remise en liberté.

Asma Jahangir

C’est en 1980, dans un climat de corruption et de violence croissantes, qu’Asma, sa soeur et deux autres militantes, forment le premier cabinet d’avocats dirigé par des femmes au Pakistan: l’AGHS. Le nom du cabinet est tiré des initiales de ses quatre fondatrices: Asma, Gulrukh, Hina et Shahla. « Je ne pensais pas que le cabinet allait survivre plus de six mois », confie Jahangir. Dès le début de sa création, l’AGHS s’est assigné pour mission de défendre les droits des femmes. En 1983, les quatre militantes participent à la création du Women’s Action Forum, groupe de pression dont le but est d’expliquer les conséquences d’une « islamisation » de la législation sur les droits fondamentaux, en particulier ceux des femmes.

Asma Jahangir a toujours fait campagne contre les ordonnances sur les Huddud, une série de lois prévues pour l’application de peines mentionnées dans le Coran et en vertu desquelles, les victimes de viols sont accusées de zina(adultère), crime passible de la peine capitale.

Le 12 février 1983 marque un tournant dans le combat d’Asma pour les droits des femmes au Pakistan: une trentaine de femmes descendent dans la rue avec elle et ses consoeurs pour protester contre la condamnation de Safia Bibi, une jeune fille aveugle violée et condamnée pour zina à la peine capitale. L’AGHS finit par obtenir la levée de cette condamnation.

La trajectoire personnelle d’Asma Jahangir s’inscrit dans le déroulement de l’histoire politique moderne du Pakistan. Alors que des tribunaux militaires et religieux composés de juges autonommés sont établis sous la présidence de Zia-ul-Haq, Asma poursuit avec plus d’acharnement son combat pour le mouvement des droits civils au Pakistan et pour le respect des droits de l’homme. En 1986, elle participe à la création de la Commission pakistanaise des droits de l’homme, au sein de laquelle elle a occupé les postes de secrétaire générale et de présidente.

Asma Jahangir

Sur la scène internationale, elle a occupé les postes de Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, arbitraires ou sommaires de 1998 à 2004 et de rapporteuse spéciale sur la liberté de religion et de croyance de 2004 à 2010. En dépit du rôle clé qu’elle a joué au sein de la communauté onusienne des droits de l’homme, elle a été placée en résidence surveillée en 2007 sur ordre du président Musharaf. Cette sanction a été levée la même année suite à une campagne internationale à laquelle participa activement la Fondation Martin Ennals.

En 1990, Benazir Bhutto lui a proposé de présider l’assemblée nationale mais Asma a refusé, expliquant que cela l’empêcherait de se consacrer pleinement à ses activités de militante des droits de l’homme. De même, en 1994, elle s’est vu proposer de devenir la première femme juge à la Cour suprême du Pakistan, offre qu’elle a déclinée pour des raisons de principe. « Ce serait hypocrite d’être juge et de défendre des lois auxquelles je ne crois pas… », déclare-t-elle.

Jahangir donne régulièrement des conférences sur les droits de l’homme. Elle est l’auteur de deux ouvrages intitulés Divine Sanction? The Hudood Ordinance et de Children of a Lesser God: Child Prisoners of Pakistan.

Reconnue sur la scène internationale pour son engagement, elle a reçu de nombreux prix des droits de l’homme et a été nominée pour le Prix Nobel de la paix en 2005 en tant que membre du projet « 1000 femmes pour la paix ». Elle est actuellement présidente de l’Association du Barreau de la Cour suprême du Pakistan.

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