Défenseur des droits de l’homme zimbabwéen et avocat décrit comme « audacieux » et « tenace », Arnold Tsunga est le fondateur et l’ancien directeur de Zimbabwe Lawyers for Human Rights (ZLHR- Avocats du Zimbabwe pour les droits de l’homme). Sous le régime de Mugabe et tout au long des années 2000, Tsunga a été la cible de nombreuses campagnes d’agression pour ses activités de défenseur des droits de l’homme. Il dirige actuellement le Programme régional Afrique au sein de la Commission internationale de juristes (ICJ – International Commission of Jurists).
A la fin des années 1990, Tsunga a renoncé à sa carrière d’avocat privé pour se consacrer au développement de programmes des droits de l’homme au Zimbabwe. Engagé dans la lutte contre ce qu’il décrit comme « la corruption totale du système de gouvernance », Tsunga a cherché à œuvrer pour la démocratie et le respect des droits de l’homme tout en apportant des solutions pour une « transformation politique ».
Ancien secrétaire exécutif de la Law Society of Zimbabwe (LSZ- Avocats du Zimbabwe pour les droits de l’homme) et ex-président national de la Zimbabwe Human Rights Association (ZimRights- Association zimbabwéenne pour les droits de l’homme), Tsunga a joué un rôle central dans la création de groupes de la société civile pour la protection et la promotion des droits de l’homme au Zimbabwe.
En 2002, Tsunga a commencé à être la cible d’attaques violentes: le 9 mars de la même année, il a été enlevé par un groupe de vingt soldats. Six autres personnes étaient alors à ses côtés; tous ont été menacés, un fusil d’assaut pointé sur eux, et agressés physiquement en face d’une foule de badauds. Tsunga a ensuite été placé en détention et soumis à différentes formes de torture. Cette expérience l’a obligé à réfléchir sur la nature de son travail, à savoir s’il était encore possible de travailler dans un tel état de non-droit.
En septembre 2002, suite à l’enlèvement du député Roy Beneton par des agents des services de renseignement, Tsunga lui a rendu visite dans un centre de détention de l’armée. Il a été menacé avec un fusil par des agents des renseignements.
Dans le cadre de sa lutte contre l’oppression, la corruption du système judiciaire et la politisation des services de sécurité, Tsunga a fait du ZLHR un mécanisme de représentation juridique des victimes de violations des droits de l’homme et de protection pour les défenseurs des droits de l’homme. Tsunga a travaillé en étroite collaboration avec la communauté internationale des droits de l’homme, non seulement pour assurer la formation d’avocats et de militants des droits de l’homme, mais aussi pour documenter les violations des droits de l’homme massives au Zimbabwe.
Les pratiques du Zimbabwe en matière de droits de l’homme ont continué à empirer en 2005: une campagne d’expulsion massives et de démolitions menée par le gouvernement a laissé plus de sept cents mille personnes sans abri. Malgré la fermeture de relais médiatiques et l’étouffement de l’opposition, Tsunga et le ZLHR ont travaillé sans relâche pour défendre les victimes et demander justice. Le ZLHR a défendu des victimes devant la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, laquelle a condamné, dans une résolution, la détérioration de la situation des droits de l’homme au Zimbabwe.
Tsunga a joué un rôle central dans ce succès mais s’est attiré les foudres du régime de Mugabe.
En 2006, Tsunga a fait l’objet de graves pressions de la part des autorités. Le 26 janvier 2006, un soldat est venu le chercher à son bureau de ZimRights. Comme il était absent, le soldat a expliqué à son collègue qu’un commando du corps des services de renseignement de l’armée, chargé de surveiller les déplacements de Tsunga, avait reçu l’ordre de le tuer.
Le harcèlement ne s’est pas arrêté là. Tsunga est devenu la cible d’une campagne de diffamation et a été arrêté pour « détention illégale de matériel de radiodiffusion. » Il a été libéré quelques temps après sous caution. A cette époque, Tsunga était administrateur de la station de radio indépendante zimbabwéenne la Voix du Peuple (VDP).
Les autorités ont continué de le persécuter. Cette fois, c’est sa maison, décrite par le régime comme un « refuge pour les trafiquants de passage en route vers le Mozambique », qui a été prise d’assaut. Deux de ses employés ont été enlevés et accusés de faire du trafic de sucre. Il a fallu neuf heures aux avocats de l’association de Tsunga pour les retrouver et négocier avec l’armée leur libération.
Un mois plus tard, six policiers armés ont escaladé le mur sécurisé de sa maison à Harare et ont enlevé son chauffeur et les gardiens. Ils ont été détenus au secret pendant quatre jours.
Les efforts inlassables de Tsunga ne sont pas passés inaperçus aux yeux de la communauté internationale des droits de l’homme. En octobre 2006, lors d’une cérémonie au bâtiment des forces motrices à Genève, Tsunga a reçu le prix Martin Ennals pour les défenseurs des droits de l’homme avec le dissident et journaliste d’investigation iranien Akbar Ganji. Arnold Tsunga a écrit au Secrétariat quelques semaines plus tard: « Je suis ravi que les agents de l’Etat qui ont essayé de me harceler il y a des semaines murmurent entre eux que j’ai gagné une reconnaissance internationale de Genève et que cela les a rendus très mal à l’aise ».
Tsunga dirige aujourd’hui un programme à la CIJ. Il continue aussi de donner des conseils pro bono aux organisations des droits de l’homme qui travaillent sur les questions des droits de l’homme au Zimbabwe et dans la région.